Analyse du paysage du chemin du Roy
En 2007, la FQPPN a confié à Chantal Prud’Homme, architecte paysagiste le soin de réaliser une étude du paysage des abords du fleuve et du Chemin du Roy.
L’objectif de l’étude vise la connaissance du paysage d’une partie du territoire de la Ville de Saint-Augustin afin d’en identifier les composantes paysagères d’intérêt et de mettre en évidence l’influence de la biodiversité sur le paysage. Cette étude propose une synthèse des principaux éléments qui distinguent le paysage du secteur à l’étude de manière à mettre en évidence ses points forts et uniques, particulièrement la contribution des éléments naturels dans la signature paysagère de Saint-Augustin. Cette lecture du paysage vise à cerner les principaux enjeux et à formuler des recommandations à l’égard de la protection ou de la mise en valeur du paysage, en accord avec les objectifs poursuivis par la FQPPN à l’égard de la protection du milieu naturel de Saint-Augustin. Cette étude se pose comme défi d’articuler une vision d’avenir intégrant paysage et protection des milieux naturels d’intérêt.
Cette étude a été réalisée avec la collaboration de Nadine Beaudet, architecte paysagiste pour l’analyse de l’évolution du paysage de même qu’avec la collaboration de Canards Illimités Canada, de la Communauté métropolitaine de Québec et de la Direction générale de Québec du Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec pour la production des cartes. Mais surtout cette étude n’aurait pu être menée avec autant d’enthousiasme sans l’implication des membres de la FQPPN et particulièrement de Madame Nicole Lavoie.
Découvrez la série d’articles qui a été produite dans le cadre de ce projet et apprenez en davantage sur les paysages de Saint-Augustin-de-Desmaures
Battures, érablières riveraines, sur escarpement ou en bordure de champs, zones de villégiature en transformation, parcours patrimonial où l’on observe des bâtiments d’intérêt architectural; voici divers éléments du paysage augustinois à découvrir le long du fleuve ou du chemin du Roy…
L’objectif de l’étude vise la connaissance du paysage d’une partie du territoire de la Ville de Saint-Augustin afin d’identifier les composantes particulières de celui-ci et de mettre en évidence leur influence sur la biodiversité. Cette étude pose un diagnostic, cerne les principaux enjeux et formule des recommandations liées à la protection et à la mise en valeur du paysage, en accord avec les objectifs de protection du milieu naturel poursuivis par la FQPPN. Cette étude propose le défi d’articuler une vision d’avenir intégrant paysage et protection des milieux naturels d’intérêt à laquelle tous les augustinois sont conviés à participer.
Le fleuve et sa batture, l’escarpement boisé, le paysage agricole et le Chemin du Roy constituent des composantes caractéristiques du paysage augustinois. La terrasse fluviale borde un marais intertidal au cortège floristique exceptionnel. La batture et une rive naturelle non habitée contribuent à l’intégrité écologique et à la qualité paysagère du littoral. Le parc du Haut-Fond et une érablière sur terrasse marine augmentent ce capital naturel d’intérêt associé au fleuve. Une érablière sucrière, un verger centenaire et deux hêtraies forment un grand ensemble naturel d’intérêt quasi-continu, rattaché à l’escarpement. Des boisés morcelés le long des terrasses et des rivières, des érablières de plus de 70 ans, des érablières humides, des friches et de jeunes boisés marquent le capital naturel de l’espace agricole. Plus de 350 ans d’occupation ont forgé un paysage humanisé découpé par de longues terres étroites, encore cultivées et habitées par sept familles-souches et de grands propriétaires institutionnels le long de la plus vieille route carrossable au Canada, le Chemin du Roy.
Désormais, la dégradation des paysages menace leur intégrité naturelle. Les diverses occupations situées dans les bassins versants des rivières et ruisseaux menacent l’intégrité écologique et la biodiversité de la batture. Les implantations et les aménagements résidentiels, de même que des pratiques agricoles s’intègrent peu au caractère naturel des rives du fleuve ou de ses tributaires. Les résidences permanentes construites sur de petits terrains de villégiature réduisent le potentiel de naturalisation en bordure du fleuve. Des terrains boisés sensibles sont recherchés pour la construction résidentielle et la création de percées visuelles sur le fleuve dégrade la crête de l’escarpement boisé. La banalisation des paysages affecte également leurs caractères identitaires. L’ancien milieu de villégiature se transforme en secteur résidentiel. Il s’ensuit une forte privatisation de la rive du fleuve et une fermeture visuelle du paysage. Les espaces ouverts entretenus par l’agriculture sont menacés par l’expansion résidentielle ou par les friches. Des patrimoines bâtis, agricoles, horticoles et paysagers sont aussi menacés de disparition.
Les recommandations et les priorités d’action sont regroupées en quatre grands thèmes : la protection du paysage fluvial, la protection de l’escarpement, la maîtrise de l’évolution du paysage agricole et la maîtrise du caractère des axes routiers. Le projet de paysage définit une vision d’avenir, celle de « marquer la biodiversité du paysage augustinois » afin d’accroître la biodiversité du territoire dans le respect de l’identité paysagère créée par la collectivité de Saint-Augustin depuis sa fondation. Le Plan paysage constitue un outil de référence et situe les recommandations sur le territoire afin de favoriser la concertation de tous les intervenants qui modifient ce paysage. Il s’agit d’un projet orienté vers l’avenir, non figé dans le passé et ancré dans une vision qui prend en compte le paysage comme bien public dont la collectivité augustinoise et les différents intervenants du milieu en sont les gardiens.
Chantal Prud’Homme, architecte paysagiste
Avec ses vastes champs et ses bâtiments agricoles, le paysage champêtre des abords du chemin du Roy offre des panoramas splendides sur le fleuve et sur les boisés de ferme. Sur les 52 exploitations agricoles répertoriées sur le territoire de Saint-Augustin, sept se retrouvent au sud de la route 138. Quatre sont orientées vers la production laitière mais il y a également un élevage de bovins de boucherie et deux exploitations fourragères. Le maïs occupe environ 33% des surfaces cultivées. Les autres productions sont, par ordre d’importance : le foin, l’avoine, le soya, l’orge et des productions maraîchères comme la citrouille. Les boisés de ferme, couvrant une superficie de 320 hectares, contribuent également au paysage augustinois dans le secteur du chemin du Roy. Sur cette superficie, 223 hectares sont occupés par des érablières à potentiel acéricole.
Enjeux liés à l’agriculture
L’expansion du périmètre urbanisé de la municipalité diminue la surface occupée par les terres agricoles. Entre 1963 et 2007, la zone urbaine de Saint-Augustin est passée de 14 à 207 hectares. De façon générale au Québec, la pression exercée sur le milieu agricole est forte étant donné le besoin d’espace pour le développement immobilier et industriel.
De plus, l’agriculture à Saint-Augustin suit une tendance à la baisse, identique à celle de la région de Québec, soit une diminution du nombre d’exploitations agricoles, une augmentation de l’âge moyen des producteurs déjà bien supérieur à celui de la moyenne québécoise et une agriculture à temps partiel pour 63 % des fermes. Quand ils ne sont pas laissés en friche, les terrains à vocation agricole sont de plus en plus utilisés pour une agriculture à grande échelle. L’industrialisation de l’agriculture a des impacts importants sur les paysages : les cours d’eau sont redressés, les arbres et les haies séparatrices sont coupées et les terres cultivées deviennent de grandes surfaces homogènes, banalisant ainsi le paysage. Ces modifications de l’agriculture, ont entraîné la disparition de plusieurs bâtiments agricoles sur le chemin du Roy. Au total, 84 bâtiments ont disparu depuis 1963, particulièrement des maisons ancestrales et des granges.
Certaines pratiques agricoles favoriseraient le maintien du caractère rural du paysage augustinois et contribuerait à rendre l’environnement plus sain. D’abord, la plantation d’arbres en bordure des cours d’eau améliorerait la qualité de l’eau et donnerait un aspect plus naturel à ces habitats. La plantation de haies brise-vent permettrait de réduire les problèmes d’érosion éolienne, d’augmenter le rendement des cultures et de protéger les animaux ainsi que les bâtiments. Le développement d’entreprises agricoles de plus petite échelle, de cultures maraîchères ou de produits biologiques, pourrait être encouragé dans le cadre des programmes d’agriculture soutenue par la communauté (ASC). Certains ensembles de bâtiments agricoles d’intérêt patrimonial pourraient être reconnus et mis en valeur par la ville.
En 2007, la Fondation québécoise pour la protection du patrimoine naturel (FQPPN) a confié à madame Chantal Prud’homme, architecte paysagiste, la réalisation d’une étude sur le paysage des abords du fleuve Saint-Laurent dans le secteur situé au sud de la route 138. Cette étude a permis d’identifier les traits distinctifs du paysage de notre ville et de formuler des recommandations visant à les protéger.
Cette chronique rappelle les éléments marquants de cette étude.
Une étude du paysage axée sur les milieux naturels
Conformément à la mission première de la FQPPN, soit la protection des milieux naturels de grande valeur écologique, une attention particulière a été accordée à l’importance de la nature dans la composition du paysage. Ainsi, l’étude du paysage a permis d’identifier les éléments naturels d’intérêt et de formuler des recommandations favorisant leur conservation.
Un paysage marqué par la présence de milieux boisés âgés de plus de 70 ans
Aux abords du fleuve et du chemin du Roy, les boisés couvrent une superficie d’environ 430 hectares. Ces massifs forestiers, dont la superficie et la répartition sont restées pratiquement inchangées depuis 1938, sont composés de peuplements forestiers matures, principalement des érablières.
En bordure du fleuve, des milieux sensibles abritent des espèces végétales particulières
Sur le littoral, le marais intertidal est demeuré intègre et est reconnu par la communauté scientifique et les ministères québécois et canadien de l’Environnement comme un site dont la conservation est essentielle et prioritaire, notamment pour assurer la survie de 13 espèces de plantes dont la situation est précaire au Québec.
Des marécages d’une superficie de 53 hectares se trouvent également en bordure du fleuve et forment, à l’ouest, une bande boisée de près de deux kilomètres de longueur et à l’est, plusieurs boisés morcelés. Ces marécages sont composés d’érablières rouges et d’érablières argentées. Ces dernières constituent des éléments naturels d’intérêt puisque l’érable argenté se trouve dans la région à la limite nord-est de son aire de distribution.
Des milieux naturels d’intérêts intégrés au paysage dont le parc des Hauts-Fonds
Cinq milieux naturels d’intérêts ont été identifiés dans la zone d’étude par le Service de l’environnement de la Ville de Québec. Il s’agit du parc des Hauts-Fonds, des battures de Saint-Augustin, de l’érablière sur terrasse marine située en bordure du fleuve à l’ouest du parc des Hauts-Fonds, de l’escarpement et de la hêtraie situé à l’est de Saint-Augustin, identifiée comme écosystème forestier exceptionnel par le ministère des Ressources naturelles et de la Faune. Ces milieux naturels sont précieux étant donné leur rareté, leur degré de maturité, leur richesse écologique et leur rôle quant à la protection de la qualité de l’eau.
Que faire pour protéger nos milieux naturels?
L’étude du paysage augustinois a permis de formuler certaines recommandations particulières en lien avec les milieux naturels. Tout d’abord, les massifs forestiers existants depuis 1938 devraient être protégés. Les bandes riveraines des tributaires du fleuve pourraient être reboisées et il serait intéressant d’y aménager des petits îlots boisés afin de marquer la présence des cours d’eau. De plus, les activités de renaturalisation en cours avec les riverains permettront de restaurer et de stabiliser les rives du fleuve. Des précautions devraient aussi être prises afin de minimiser l’impact des constructions aux abords des milieux boisés, humides ou marécageux. Par ailleurs, la mise en place d’un plan d’implantation et d’intégration architecturale (PIIA) par la ville de Saint-Augustin contribuerait à favoriser l’harmonisation des bâtiments au caractère naturel du paysage.
À Saint-Augustin, l’agriculture a longtemps été le moteur principal du développement du territoire. La présence de granges, d’étables et de caveaux à légumes parsemés le long des rangs témoigne de cette activité. Les sols y sont relativement riches et présentent un excellent potentiel pour une vaste gamme de cultures. Comme ils sont principalement composés d’argile, d’alluvions ou de dépôts de tills ils nécessitent souvent des travaux de drainage. Bien que la vocation agricole se perpétue encore à Saint-Augustin, celle-ci est en voie de mutation. Comme ailleurs au Québec, l’évolution des pratiques agricoles encourage la consolidation des entreprises, modifie l’organisation des cultures et incite à constituer de plus grandes exploitations.
Qu’en est-il du portrait actuel de l’agriculture à Saint-Augustin? Une étude sur les paysages, réalisée en 2007, par la Fondation québécoise pour la protection du patrimoine naturel (FQPPN) a permis de rassembler des données agricoles sur la portion sud du territoire de Saint-Augustin, comprise entre la route 138 et le fleuve Saint-Laurent. Sur cette portion de territoire, les surfaces cultivées occupent actuellement 635 hectares dont la majeure partie correspond à la production de maïs (205 ha). Les autres surfaces cultivées sont destinées aux grandes cultures comme l’avoine, le soya, l’orge, le foin et les pâturages. On y trouve aussi quelques productions maraîchères. Au total, il existe sept exploitations agricoles sur le territoire à l’étude soient une d’élevage de bovins de boucherie, quatre de production laitière et deux de production de fourrages.
À Saint-Augustin, le paysage est caractérisé par la présence du fleuve Saint-Laurent. Certains endroits particuliers de la ville tels que les belvédères du parc de la falaise et du parc des Hauts-Fonds et le chemin du Roy offrent des vues splendides sur le fleuve. Ce paysage fluvial suit un rythme bien particulier : celui des marées. Chaque jour, en un même lieu, les eaux du fleuve montent puis redescendent à deux reprises.
Ce va-et-vient des marées est particulièrement important dans la région de l’estuaire d’eau douce, comprise entre Grondines et Saint-Jean-Port-Joli. En raison du rétrécissement du lit du fleuve entre ces deux localités, les marées d’eau douce peuvent atteindre de 4 à 5 mètres d’amplitude. À titre comparatif, l’amplitude des marées ne dépasse pas 2 mètres à Sept-îles ou à Gaspé et 1 mètre aux îles de la Madeleine.
À marée basse, le Haut-Fond de Saint-Augustin se dévoile. Ce haut-fond est en fait une large bande de terre située entre la rive et le fleuve qui s’étend sur plus de 7 kilomètres de long. La présence de ce haut-fond a permis le développement d’un marais intertidal qui abrite plusieurs populations d’espèces de plantes très rares dans le monde. Ces plantes se sont adaptées aux fortes marées d’eau douce et ont colonisé le milieu.
Les phases lunaires et le dégel printanier causent une augmentation de l’amplitude des marées au mois de mai. Durant cette période, l’amplitude des marées peut atteindre 6 mètres. Ces grandes marées transportent avec elles différents débris qui échouent au printemps sur les berges du fleuve. Ces débris sont parfois d’origine naturelle par exemple lorsqu’il s’agit de troncs et de branches d’arbres. L’accumulation de végétaux contribue à la protection du littoral et favorise l’implantation de la végétation. À ces débris naturels s’ajoutent des déchets d’origine humaine tels que des bouteilles, des pneus et des sacs de plastique. Ces déchets, en plus d’être désagréables pour les promeneurs, perturbent les habitats naturels, la faune et la flore.
UNE FAÇON D’UTILISER LES PLANTES INDIGÈNES AFIN D’HARMONISER SON AMÉNAGEMENT PAYSAGER.
L’augmentation de l’intensité lumineuse et la fonte des neiges donnent peut-être à certains d’entre vous l’envie de planifier vos projets de jardinage. Si vous souhaitez jardiner de façon plus écologique, le choix de plantes indigènes serait judicieux. Botaniquement parlant, on définit une plante indigène comme une plante qui pousse spontanément dans une région donnée sans l’intervention humaine. À titre d’exemple, l’iris versicolore, l’emblème floral du Québec, croît naturellement dans les lieux humides. Afin de définir si une espèce est indigène dans un endroit précis, il faut d’abord évaluer dans quel domaine bioclimatique elle se retrouve. Saint-Augustin-de-Desmaures se situe le domaine bioclimatique de l’érablière à tilleul. Les espèces qui croissent dans cette zone sont bien différentes de celles qui se trouvent, par exemple, dans le domaine bioclimatique de la toundra arctique du nord du Québec. Il faut également porter une attention particulière à l’habitat naturel de l’espèce. Certaines espèces se développent dans les milieux humides tandis que d’autres préfèreront les milieux boisés ou les prairies.
Il existe de nombreuses raisons de privilégier le choix des plantes indigènes. Tout d’abord, puisque les espèces indigènes que vous aurez choisies trouveront naturellement dans votre jardin les conditions optimales pour assurer leur croissance (ensoleillement, type de sol, humidité, etc.), les efforts que vous aurez à déployer pour leur entretien seront limités. De plus, l’usage des pesticides ou de fertilisants sera peu ou pas nécessaire ce qui représente un atout considérable pour le maintien d’un environnement en santé. En créant un jardin naturel, vous fournirez également à la faune nourriture et habitat.
Si vous souhaitez jumeler d’autres espèces à vos plantes indigènes, évitez de planter des espèces exotiques envahissantes. Une plante exotique est une plante qui provient d’un autre continent ou d’un domaine bioclimatique éloigné et qui a été introduite accidentellement ou intentionnellement. Elle est dite envahissante lorsqu’elle réussit à s’établir dans de nouveaux milieux et se répand rapidement, souvent aux dépens des espèces indigènes.
À l’échelle mondiale, les espèces envahissantes constituent l’une des causes majeures de disparition des espèces indigènes car elles utilisent plus efficacement les ressources du milieu (minéraux, lumière, espace, etc.) et sont moins prédatées. Le phénomène d’invasion par les espèces exotiques envahissantes représente, dans certains cas, un défi majeur pour le rétablissement d’espèces en péril. Puisqu’on retrouve sur le littoral de Saint-Augustin près d’une vingtaine d’espèces de plantes menacées ou susceptibles de le devenir, nous recommandons particulièrement aux citoyens habitant près du fleuve d’ouvrir l’œil sur les espèces envahissantes dans leur jardin ou leur voisinage.
En résumé, opter pour une plante indigène c’est choisir une espèce bien adaptée à son milieu. Celle-ci s’harmonisera au paysage et poussera naturellement sans l’usage de produits chimiques et imposera un minimum d’entretien. Il s’agit d’un choix judicieux et tout à fait naturel !
Afin d’obtenir des informations supplémentaires sur les espèces indigènes ou les espèces exotiques envahissantes, n’hésitez pas à communiquer avec nous.
La Station agronomique de Saint-Augustin représente un élément d’importance dans le paysage agricole de la ville puisqu’il s’agit de la plus grande propriété en bordure du fleuve entre la pointe de Jean-Gros et le marais Provancher, aux limites de Neuville.
Cette grande ferme a été créée en 1956 par les Augustines de l’Hôpital général de Québec à la suite du regroupement de plusieurs anciennes fermes familiales. C’est en 1963 que l’Université Laval en devient propriétaire et crée la Station agronomique de Saint-Augustin (SASA). Durant plusieurs années, l’Université Laval mène sur la station des projets d’envergure dans le domaine de la production animale notamment sur le croisement des bovins de boucherie et vers la fin des années 1980, on y assiste à la naissance du premier veau éprouvette au Canada.
De nos jours, la station agronomique est la seule propriété agricole de type industrielle à Saint-Augustin. Elle est spécialisée en production végétale, plus spécifiquement dans les grandes cultures telles que le maïs, le soja et le canola. Plusieurs lots sont loués pour la culture de maïs tandis que d’autres sont utilisés à des fins de recherche. On peut donc y observer de grands champs en culture qui côtoient des parcelles morcelées pour la recherche et l’enseignement. Les superficies importantes en cultures de maïs et les vastes bâtiments de la ferme tranchent dans le paysage agricole de la ville, plutôt caractérisé par la présence de fermes familiales et de productions diverses.
On retrouve aussi sur la station agronomique d’importantes superficies boisées, localisées en bordure du fleuve Saint-Laurent et le long de la rivière des Roches. Puisque les superficies occupées par la plupart des boisés de la station agronomique sont constantes depuis au moins 1938, ces boisés constituent des exemples représentatifs de forêts de la région immédiate de la ville de Québec. En bordure du fleuve Saint-Laurent, se trouve une érablière rouge sur un site humide, possédant un potentiel acéricole intéressant. Cette érablière abrite plusieurs espèces qui atteignent, dans la région, la limite nord-est de leur aire de répartition, comme l’érable argenté, le peuplier deltoïde et le frêne de Pennsylvanie ainsi que de grands érables rouges. On y observe également le noyer cendré, une espèce en voie de disparition au Canada.
La rivière des Roches traverse la partie ouest de la station agronomique. Elle présente une succession de fosses et de rapides, autant de sites potentiels pour la fraie des certains poissons. On y a déjà pêché l’omble de fontaine. Les massifs boisés qui longent la rivière des Roches sont composés principalement d’érables et on y retrouve des petits milieux humides et des ruisseaux intermittents. Plusieurs chicots de fort diamètre représentent des habitats potentiels pour des canards arboricoles tel que le canard branchu qui recherche les cavités des arbres pour nicher.
Étant donné que le territoire de la station agronomique présente plusieurs éléments importants en terme de diversité biologique, l’Université Laval et la Fondation québécoise pour la protection du patrimoine naturel ont travaillé conjointement, en 2007, à la production d’un plan de gestion qui identifie les éléments naturels à protéger et élabore différentes recommandations pour la conservation du territoire et de ses ressources. Cette démarche pourrait mener éventuellement à une meilleure protection de certaines portions du territoire.
Le 400e anniversaire de Québec connecte avec l’époque de la colonisation européenne du continent et inspire le thème de cette chronique sur les paysages augustinois, dédié à l’héritage légué par le régime seigneurial.
Entre 1608 et le milieu du 18e siècle, plusieurs milliers de français quittent leur pays à la recherche de liberté. La Nouvelle-France s’organise selon le mode du régime seigneurial qui divise le vaste territoire en seigneuries. Pour favoriser le peuplement de la colonie, les devoirs du seigneur exigent de concéder des lots à des colons, nommés censitaires, et de construire un moulin à farine. En contrepartie, le censitaire doit défricher la terre, y construire sa maison et œuvrer à la construction et à l’entretien des chemins.
Le cadastre typique du régime seigneurial subdivise le territoire en longues terres étroites, perpendiculaires au fleuve. Ce cadastre favorise l’accès au fleuve au plus grand nombre de colons. Les lots sont desservis par des rangs parallèles au fleuve et les rangs reliés par un chemin de desserte. Les habitations se construisent sur la ligne de front de chaque rang formant un habitat aligné. À Saint-Augustin, plusieurs axes routiers rappellent l’époque du régime seigneurial. Le chemin du Roy, première route carrossable au Canada, marque aussi le premier rang de la seigneurie et est ouvert en 1716, alors que la route 138, nommée aussi la route d’Aiguillon, correspond au deuxième rang. L’absence d’habitation le long du chemin Girard témoigne de son rôle de chemin de desserte. Deux monuments commémorent les premiers établissements augustinois : le long du chemin du Roy, une plaque rappelle la première chapelle de 1694 et près de la côte à Gagnon, une croix marque l’emplacement des vestiges de la première église de pierres. Les familles Rochette, Racette, Desroches, Gaboury et Côté occupent toujours la terre de leur ancêtre fondateur de Saint-Augustin.
Le chemin du Roy livre la lecture d’un paysage typique du régime seigneurial, particulièrement entre les limites de Neuville et le chemin Girard. On y trouve la maison Quézel, un rare témoin du régime français, caractéristique par son architecture et sa façade orientée vers le fleuve. On aime le chemin du Roy pour son charme avec son tracé étroit et sinueux, ses ponts de bois, ses clôtures de perche, ses quelques vergers et la présence de vieux alignements d’arbres, ses anciens bâtiments, et ses points de vue sur les champs en culture. Qu’est devenu cet ancien rang « Bordeleau » ? Environ quatre-vingts bâtiments, associés à des fermes, y ont disparu. Le développement malmène son paysage champêtre, le couvre de bornes-fontaines et d’une ligne électrique aérienne, rectifie son tracé en ligne droite, élargit sa chaussée et ses fossés, ou le borde de résidences qui s’harmonisent peu à son caractère.
Saint-Augustin représente le premier jalon du chemin du Roy qui s’étend jusqu’à Montréal et qui est reconnu comme axe patrimonial et touristique. Il appartient aux augustinois d’en protéger l’héritage et l’inscription dans le paysage.
Cette chronique sur les paysages augustinois est dédiée à la falaise de Saint-Augustin. Vers l’ouest, à partir de la côte à Gagnon, la falaise de Saint-Augustin s’éloigne graduellement du fleuve, longe le côté nord du chemin du Roy et se prolonge jusqu’à Neuville vers l’ouest. Elle comprend le parc de la Falaise et une partie du parc des Hauts-Fonds. Vers l’est, elle borde les battures du fleuve et se poursuit jusqu’à la plage Saint-Laurent pour bifurquer vers le nord à Cap-Rouge. Une partie de ce versant, comprise entre la rue du Brome et l’extrémité ouest du chemin de la plage Saint-Laurent, longue de 6 km, est reconnue comme milieu naturel d’intérêt selon le Répertoire des milieux naturels d’intérêt de Québec.
Ce versant boisé regroupe plusieurs peuplements d’arbres matures, épargnés de la coupe forestière étant donné le relief escarpé. Il s’agit principalement d’une vaste érablière à sucre dont le plus vieux peuplement est situé dans le prolongement de la route Tessier. Hêtre à grandes feuilles, chêne rouge, frêne blanc, tilleul d’Amérique, noyer cendré et bouleau blanc accompagnent l’érable à sucre. Sur le plateau situé entre le cours d’eau Desrochers et la rivière du Curé, un peuplement composé de vieux chênes rouges se distingue par sa majesté. Tout près, un verger, présent sur les photographies aériennes de 1938, ajoute à la diversité des lieux. Une partie de ce verger sera affectée par le projet de lotissement résidentiel Couture.
La falaise contribue à la structure du paysage de Saint-Augustin et correspond à une composante identitaire du paysage fluvial et du chemin du Roy. Elle est aussi un espace de biodiversité. Hautement valorisé pour la vue qu’elle offre sur le fleuve et malgré la présence de secteurs zonés « conservation », la pression exercée par le développement résidentiel y est forte. Ici et là, on peut repérer du déboisement de la crête ou au pied du versant, de même que des travaux de remblai et de déblai qui la dégradent. Elle est très sensible à l’érosion et susceptible d’engendrer des glissements ou des mouvements de terrain. Le déplacement prochain de trois maisons situées au pied de la falaise en témoigne.
Le projet « Paysages », initié en 2007 par la FQPPN propose différentes actions pour valoriser les qualités paysagères de Saint-Augustin et protéger les peuplements forestiers de la falaise. Les boisés d’intérêt méritent d’être conservés et protégés de tout empiètement. Certains secteurs devront aussi être restaurés. La plantation d’arbres serait souhaitable sur le rebord de la falaise pour en conserver l’aspect naturel, particulièrement pour les portions visibles à partir du chemin du Roy. La conservation des arbres et la limitation des remblais et déblais au pied de l’escarpement se révèlent essentiels pour ne pas fragiliser ou déstabiliser cet espace sensible le long du chemin du Roy.
L’aménagement d’accès publics au paysage par la création de belvédères ou d’un éco-sentier piétonnier le long du sommet de la falaise représente aussi un beau défi pour faire découvrir par la communauté augustinoise ce capital de vues exceptionnelles sur le fleuve.
Le fleuve a façonné l’histoire de Saint-Augustin. Ses berges ont été occupées par les Amérindiens depuis au moins 5000 ans, puis ont accueilli ses premiers foyers d’établissement et le moulin seigneurial.
Contrairement à Neuville qui a connu un développement économique lié à la construction navale, peu d’activités maritimes ont marqué Saint-Augustin. D’hier à aujourd’hui, la rive bordée d’un haut-fond a restreint ces activités et représente une des permanences du paysage de Saint-Augustin. Ce haut-fond s’étend sur une longueur de 7 kilomètres.
En raison de la présence de ce haut-fond, deux épaves gisent dans les eaux du Saint-Laurent vis-à-vis de Saint-Augustin. L’Atalante, un navire français aux prises avec plusieurs frégates anglaises, a coulé face aux îlets Dombourg, aux limites de Neuville durant la Conquête (1756-1760). Après avoir pris feu, le vapeur Montréal s’est échoué en 1857 au large de la pointe Jean-Gros. Ce désastre a coûté la vie à près de 200 passagers, dont la plupart étaient des émigrés irlandais.
La présence du haut-fond a permis le développement d’un marais intertidal dominé par le scirpe d’Amérique, influencé quotidiennement par des marées d’eau douce pouvant atteindre six mètres d’amplitude. Il abrite plusieurs des plus belles populations de plantes endémiques de l’estuaire fluvial du Saint-Laurent. La valeur du site est reconnue à l’échelle mondiale ! Entre autres, on peut y observer, à la fin de l’été, une magnifique espèce à fleurs bleues, le gentianopsis de Victorin, une plante rare et menacée au Québec et au Canada. Le marais fournit aussi abri et nourriture pour près de 250 espèces d’oiseaux, de poissons et de mollusques. Il sert aussi d’habitat pour la sauvagine et de halte migratoire pour les oies blanches et les bernaches du Canada.
Sur la rive et les terrasses qui lui succèdent, se trouvent également des marécages à frêne et saule et des boisés dominés par l’érable à sucre et le hêtre, et dont l’un est reconnu comme écosystème forestier exceptionnel. Tous ces habitats contribuent à la qualité des paysages augustinois et régional.
En dépit de sa valeur et de sa beauté, le paysage fluvial se dégrade progressivement. À Saint-Augustin, seulement 39 % des rives sont encore à l’état naturel, c’est-à-dire sans mur de soutènement ou sans enrochement. Plusieurs segments de rives montrent également des signes inquiétants d’érosion. Les terrains occupés par la villégiature sont maintenant convoités pour le développement résidentiel. Les habitations et les aménagements sont souvent mal intégrés au paysage. Les grands bâtiments bouchent la vue vers le fleuve et l’ancien milieu de villégiature se transforme en banlieue. Cette évolution du paysage riverain s’accompagne d’une détérioration des rives et, du même coup, des habitats littoraux.
Afin de préserver la qualité du paysage fluvial, notre communauté doit se doter d’outils pour mieux protéger et habiter les rives. De plus, la restauration des ouvrages détériorés et des segments de rives érodés représente tout un défi, soit celui de maintenir un environnement de qualité et préserver la beauté et les paysages naturels que nous offre le fleuve.
Habiter le long du fleuve, c’est avoir le privilège de vivre dans un des paysages emblématiques de la région de Québec. Le corridor navigable du fleuve, ses terrasses, ses escarpements, ses boisés d’intérêt et les différentes manières d’occuper ses rives forgent l’identité des paysages de Québec et de Saint-Augustin.
Plusieurs éléments d’intérêt distinguent les abords du fleuve à Saint-Augustin. Le chenal longe un haut-fond dont la batture conditionne la relation de la rive augustinoise avec le fleuve. Une terrasse de profondeur variable borde le fleuve. Aux limites de Neuville, elle s’étend sur une profondeur de 400 à 600 mètres, puis se rétrécit à partir de l’anse à Maheu en une mince bande inférieure à 100 m. Une érablière sucrière riveraine, d’une superficie de 13 hectares, établie sur des dépôts humides, prolonge les milieux boisés du parc des Hauts-Fonds. Elle représente une grande rareté écologique dans la région de Québec en raison des espèces qu’on y trouve comme le noyer cendré et l’érable argenté. D’autres érablières et des peuplements forestiers mélangés de plus de 70 ans occupent les bords du fleuve.
Depuis la colonie, la manière d’habiter les rives de Saint-Augustin évolue. Un moulin banal se construit en 1671 à la décharge du lac Saint-Augustin et une chapelle en bois dessert la première mission en 1694. Le centre religieux se déplace en 1720 à l’anse à Maheu avec la construction d’une église en pierres. L’augmentation progressive de la population, l’expansion de la paroisse sur le plateau et les difficultés de se rendre à l’église de l’anse, surtout lors des crues printanières, conduisent à l’érection de l’église actuelle à partir de 1809. Dorénavant, les foyers de peuplement établis au bord du fleuve se déplacent sur le plateau et les habitants se concentrent autour de la nouvelle église. L’espace riverain au fleuve et le long du chemin du Roy devient rural et agricole.
Au début du XXe siècle, l’attrait du fleuve y amène de la villégiature. Des familles natives de Saint-Augustin possédaient ou possèdent encore un chalet au bord du fleuve. On repère des chalets typiques des années cinquante, par leur petit gabarit et leur organisation en secteurs compacts égrenés au bout d’une série de chemins privés. Mais, cet ancien milieu de villégiature se transforme graduellement en une banlieue résidentielle depuis la dernière décennie. Des chalets se rénovent, certains deviennent habités à l’année et plusieurs terrains sont occupés par des résidences de plus en plus grandes. Habiter le long du fleuve en respect des qualités du milieu devient un véritable défi afin de protéger la rive, le couvert d’arbres et de créer des secteurs où s’harmonisent les bâtiments entre eux. La conservation des éléments naturels existants, la naturalisation des espaces dénudés par des végétaux indigènes, l’implantation judicieuse des résidences avec un gabarit et une architecture appropriés au milieu permettront de perpétuer le charme indéniable du paysage fluvial augustinois.
Le chemin du Roy évoque une série d’images champêtres où les champs cultivés et les bâtiments anciens se succèdent. L’agriculture a ouvert le paysage vers le fleuve Saint-Laurent et les battures. Si la vocation agricole s’y perpétue encore, ce paysage rural est en voie de mutation profonde. Comme ailleurs au Québec, l’évolution des pratiques agricoles augmente l’échelle des fermes et modifie les bâtiments agricoles et l’organisation des cultures. Mais, la proximité de Saint-Augustin avec Québec fragilise l’agriculture puisque la banlieue gagne du terrain. Désormais, de nombreuses résidences permanentes jalonnent le chemin du Roy augustinois. Les anciens chalets se font rares, abandonnés puis, remplacés par une nouvelle résidence au goût du jour.
Sur quoi repose cette ambiance de paysage rural qui nous est chère ? La vocation agricole y est précieuse pour préserver l’architecture distinctive des bâtiments agricoles, maintenir des vues vers le fleuve ou vers la falaise et conserver les érablières et les boisés de ferme. Le chemin du Roy recèle quelques exemples d’anciens bâtiments, rénovés avec succès par la préservation de l’architecture caractéristique, de ses matériaux typiques, de ses ouvertures (portes, fenêtres, lucarnes), de ses éléments en saillie (galerie, perron, solarium) et d’ornementation.
L’intégration harmonieuse d’une nouvelle résidence pose un tout autre défi. Afin de maintenir le caractère champêtre du chemin du Roy et d’y créer un développement résidentiel distinctif, certaines solutions mériteraient d’être employées. L’espacement entre les résidences, le retrait des résidences par rapport à la rue, leur orientation et leurs proportions (hauteur et superficie au sol) ont une influence déterminante sur le maintien de ce paysage à caractère rural. De même, le respect des gabarits et des pentes de toit, l’emploi de matériaux d’aspect naturel et de modèles de portes, de fenêtres ou d’ornements qui s’apparentent aux formes anciennes constituent des facteurs gagnants d’une bonne insertion résidentielle.
La végétation feuillue, la topographie naturelle et la diversité des vues forgent aussi l’identité du chemin du Roy. L’emploi de la pierre naturelle ou la conservation d’une pente existante gagne à remplacer les murets en interblocs. Le maintien d’espaces naturels ouverts connectés à la route, la plantation de végétaux feuillus et la conservation des grands arbres contribuent à son charme rural.
Le paysage n’est pas le décor où se déroule la vie des individus, mais l’étoffe même qui les enveloppe. Il peut devenir une référence commune pour bâtir une culture et une nature partagées. La conservation des éléments naturels, la maîtrise des espaces ouverts et fermés, la qualité architecturale des bâtiments, résidentiels, de villégiature et agricoles, et des aménagements paysagers et leur compatibilité avec le caractère rural du chemin du Roy, voici l’art d’habiter cette voie royale augustinoise.